Alimentation Réforme des tables de l'Inra : les calculs de rations se compliquent !
Un papier, un crayon et une calculatrice ne suffiront bientôt plus à calculer une ration. La réforme des tables de l’Inra, initiée en 2010, est désormais effective. L’objectif était de mieux prédire les réponses des animaux selon les rations proposées. Ainsi, les apports répondant à des besoins stricts et prédéfinis sont remplacés par des objectifs de production et des réponses animales hypothétiques qui permettent à l’éleveur de choisir la ration la plus adaptée à son système.
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On ne se limite plus à répondre aux besoins des animaux
Le livre rouge ne servira plus à calculer des rations qui satisfont aux besoins des animaux selon leur production mais il permettra de prédire les réponses des animaux. D’ailleurs, les besoins d’entretien (énergétiques et protéiques) ont été revus. Les chercheurs se sont alors penchés sur les réponses physiologiques des animaux selon différentes rations car ces réponses conditionnent les résultats zootechniques.
Ce sont au total 13 innovations qui permettent aujourd’hui de mieux prendre en compte ces phénomènes biologiques. Parmi elles on peut citer le transit qui n’est désormais plus constant mais varie selon le type d’aliment et c’est la même chose pour la dégradation qui varie en fonction du type de ration. D’autres équations complexes viennent également compléter les réponses physiologiques (la nutrition des microbes, les interactions digestives, la partition digestive des constituants organiques, la matière organique fermentée dans le rumen, etc.). Ces 50 nouvelles équations sont donc mises en commun pour calculer les nouvelles unités.
Le risque d’acidose est désormais évalué dans le calcul des rations. Il s’appuie sur différents critères mesurables qui ont été étudiés comme prédicteurs du pH du rumen. Ils constituent alors une échelle de risque et simplifient toutes les informations qu’on avait auparavant concernant le pH.
Pour le moment, les travaux de recherche ont surtout porté sur les vaches laitières mais la réforme devrait vite toucher le rationnement des vaches allaitantes et bovins en croissance tout comme les ovins et caprins.
Des calculs compliqués pour un résultat plus complet
Pour résumer, les valeurs UF et PDI des aliments ne seront plus directement utilisées dans le calcul des rations. Ce sont des valeurs plus techniques comme la dMO (digestibilité de la matière organique), la MOF (matière organique fermentescible), la dégradation des substrats dans le rumen (etc.) déterminant les constituants des aliments qui seront intégrés dans le calcul de ration afin de situer les aliments les uns par rapport aux autres.
Ainsi, les valeurs présentes dans les tables ne seront plus que des valeurs de repères et non plus des valeurs de la ration. Les PDIN vont alors disparaitre pour être remplacées par la BPR (balance protéique ruminale) qui prend en compte la valeur MAT de l’aliment et la matière azotée d’origine microbienne ainsi que la capacité de cet azote à se dégrader dans le rumen. De nouvelles valeurs feront également leur apparition comme la teneur AADI (acides aminés digestibles dans l’intestin) que sont la lysine, la méthionine et l’histidine. Leur intégration améliore la prévision de la production et de la réponse en TP. Le pâturage est aussi mieux intégré dans les tables avec plus de spécificités. Découvrez ces nouvelles tables sur le site Inration.fr .
Le calcul de ration ne se limitera donc plus à additionner les valeurs tables mais bien à intégrer toutes ces interactions. Il ne s’agira plus de résoudre des équations à plusieurs inconnus mais de lier de nombreux calculs plus compliqués les uns que les autres. Pour les conseillers et nutritionnistes, l’utilisation d’un logiciel va être indispensable. Aussi, les fabricants devront également fournir plus de détails quant aux valeurs des aliments et non plus se limiter aux UF et PDI.
3 approches différentes du rationnement
Les rations pourront être calculées selon trois approches :
- En conservant l’ancienne méthode qui prend en compte les besoins de l’animal et les objectifs de production et tenter d’y répondre avec différents aliments.
- En prévoyant les performances associées à une ration : « J’ai tel animal et tels fourrages, quelle sera la réponse de ma vache au niveau production et bilan énergétique ? »
- En prévoyant une ration qui permet d’atteindre un objectif de production différent de la trajectoire de référence : « J’ai un objectif de production, qu’est-ce que je peux apporter à ma vache pour l’atteindre ? »
Cette dernière approche demandera à l’éleveur de déterminer ses différents objectifs en termes de production, et/ou de bilan énergétique, et/ou d’efficience protéique, etc. et de les croiser avec ses aliments disponibles. Pour se faire, il devra choisir ses fourrages principaux et définir deux concentrés sans aucun ordre de priorité (contrairement à l’ancienne version). Le logiciel teste alors toutes les combinaisons possibles, ce qui permet à l’éleveur de choisir la matière première la mieux adaptée (en termes de résultat ou même de coût alimentaire ).
Inration 2018 donnera également quelques indicateurs quant aux rejets vers l’environnement (méthane et azote urinaire ou dans le lait). Il réalisera également des simulations économiques de marges par kg de lait selon le prix des matières premières, permettant alors des analyses technico-économiques plus poussées qu’avant.
Ce nouveau logiciel Inration V5 a été développé en copropriété entre l’Inra et Siel (l’association des contrôles laitiers de nombreux départements). Il devrait prochainement être en place dans les entreprises de conseil en élevage sous le nom Rumin’al et commercialisé ailleurs sous le nom Inration V5. Il est aussi probable que tous les établissements agricoles français aient un accès gratuit au logiciel.
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